Claude Niedner: Aspect juridique entourant la garde d’animaux tel le cheval

La responsabilité du fait des animaux:

L’animal a été durant longtemps un instrument essentiel à l’activité de l’homme. La matière liée à la responsabilité du fait des animaux a des origines anciennes. Le cheval, par sa puissance et ses réactions parfois imprévisibles, peut être à l’origine d’accidents sans en être l’auteur au sens juridique du terme. La responsabilité civile découlant des dommages causés par le cheval peut être de deux natures: délictuelle ou contractuelle.

La responsabilité délictuelle est d’un intérêt tout particulier car susceptible d’être appliquée dans les cas les plus étendus. Le cheval s’affole, renverse une personne, cause des dommages à une propriété, rue dans une voiture, s’enfuit en cavalant.

Dans le droit moderne, l’animal n’est pas responsable de ses agissements. Qui devra répondre des dommages causés par le cheval ?

C’est l’article 1385 du Code Civil qui nous donne la réponse: “Le propriétaire d’un animal, ou celui qui s’en sert, pendant qu’il est à son usage, est responsable du dommage que l’animal a causé, soit que l’animal fût sous sa garde, soit qu’il fût égaré ou échappé.”

Pour que la responsabilité délictuelle soit retenue, il faut que 2 conditions soient remplies cumulativement:

– Il doit exister un dommage causé par le cheval;

– La personne contre laquelle un recours est exercé doit être le gardien.

La plupart du temps, le propriétaire est considéré comme ayant la garde du cheval. Cependant, n’importe quelle personne peut être le gardien car pour être gardien, il suffit d’avoir la garde du cheval c.à.d. disposer du pouvoir d’usage, de contrôle et de direction sur le cheval. Cela veut dire que lorsqu’on fait une ballade avec le cheval, c’est celui qui manoeuvre le cheval, qui tient les rênes et qui donne des ordres au cheval qui sera responsable de ce dernier (Jurisprudence Cour 24 décembre 1929 ,12 ,15 et 19 décembre 1933, 13, 110).

Il existe différentes hypothèses dans lesquelles le propriétaire peut se décharger de sa responsabilité.

1. En démontrant qu’au moment de l’accident, le cheval se trouvait sous la garde d’une autre personne.

Ceci est illustré dans un arrêt de la Cour Supérieure de Justice du 3 mai 1972. Les faits à l’origine du litige sont les suivants: un propriétaire avait livré un cheval à un maréchal-ferrant pour le ferrer. Durant l’opération de ferrage, un assistant du maréchal-ferrant avait été bousculé et blessé par le cheval. Le propriétaire était présent durant toute l’opération de ferrage. Se posait alors la question de savoir qui était responsable des blessures ? Le propriétaire, le maréchal-ferrant ou l’assistant qui en aidant le maréchal-ferrant, aurait accepté de prendre le risque d’être blessé ?

La Cour Supérieure de Justice décida que le maréchal-ferrant avait seul la qualité et la compétence pour diriger l’opération de ferrage. Il était donc le gardien durant l’opération de ferrage et responsable de l’accident. Le fait que le propriétaire du cheval soit présent durant l’opération de ferrage était sans incidence.

Mais le seul fait de donner l’ordre à un préposé de s’occuper du cheval, n’entraîne en principe pas un transfert de la garde. Le propriétaire du cheval donne par exemple ordre au préposé de faire trotter le cheval. Durant le trot un accident se produit. Dans ce cas, le préposé n’est pas responsable. C’est le propriétaire qui est le gardien même s’il n’était pas présent durant le trot. Le préposé ne peut pas être le gardien du cheval car il ne fait qu’obéir aux ordres du propriétaire. Il n’a donc pas tous les pouvoirs de contrôle, d’usage et de direction.

2. Le gardien du cheval peut s’exonérer en prouvant que la véritable cause du dommage lui est étrangère. Par exemple, si la véritable cause du dommage est la faute de la victime, il suffit pour le gardien de démontrer que la faute de la victime était imprévisible et irrésistible pour lui. Il ne pouvait rien faire pour empêcher le dommage de la victime et donc il n’est pas responsable.

Il existe 2 causes d’exonération.

– le fait ou la faute de la victime

– la force majeure ou la cas fortuit: Cela comprend les inondations, la foudre, ouragan et autres phénomènes naturels ainsi que le fait ou la faute d’un tiers. Ces 2 causes ont en commun de présenter les caractères d’imprévisibilité et d’irrésistibilité pour permettre une exonération totale.

Par contre, si la faute de la victime est simplement irrésistible, mais pas imprévisible, alors le gardien et la victime se partagerons les dommages.

La frayeur du cheval n’est pas considérée forcément comme un cas de force majeur. Ainsi, le 11 avril 1929, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg a statué sur le cas suivant: Un cheval s’était effrayé à la vue d’une voiture rouge. Malgré les efforts du gardien pour maintenir le cheval, celui-ci a fini par s’échapper des mains de son maître et s’élancer au galop dans le direction d’un enfant qu’il a renversé. Le gardien invoquait la force majeure. Or la frayeur du cheval ne pouvait constituer un cas de force majeure puisque le gardien connaissait le caractère ombrageux du cheval. Il était donc prévisible qu’il puisse s’emporter et il avait donc commis une faute en laissant circuler ce cheval sur la voie publique.

La frayeur éprouvée par un animal ne peut constituer une cause étrangère susceptible de l’exonérer de sa responsabilité que lorsqu’elle est due à un événement anormal (Cour 21 février 1979, 24, 272). Une voiture qui circule normalement sur la voie public ne peut être considérée comme un événement anormal.

La faute de la victime est appréciée par les juges au cas par cas. Ainsi, le tribunal d’arrondissement statuait le 19 janvier 1903 sur une affaire où un cheval s’était subitement emporté. Le gardien n’arrivait pas à maîtriser le cheval et demanda une personne de l’aider pour éviter des dégâts. La personne s’est alors élancée à la tête du cheval pour l’arrêter mais fut entraînée dans la course effrénée du cheval et se blessa grièvement. Le tribunal estima que l’acte de dévouement de la personne victime ne pouvait être assimilé à une faute et la victime obtint réparation.

Un arrêt du 14 décembre 1964 illustre le fait d’un cheval échappé. Ainsi lorsqu’un dommage est causé par un cheval qui s’est égaré ou échappé, le responsable dans ce cas sera le propriétaire du cheval qui est toujours présumé en avoir la garde.



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